mercredi 26 octobre 2011

L'art de la suggestion

Dans la dernière revue Gong, un intéressant dossier sur l’art de la suggestion dans le haïku.

«Le dire est sans cesse dissimulé dans un dit.« (Marc-Alain Ouaknin)

«Par quel mystère le haïku, ce fragment de poésie si modeste, séduit-il autant? demande Danièle Duteil. Éternelle question qui suscite toujours des réponses multiples et variées.» 

Un de mes haïkus publié :

pluie froide
couché dans les feuilles mortes
un parasol fermé

Gong, octobre-décembre 2011, p. 56

samedi 22 octobre 2011

Le plus beau poème du monde

Léopold Sédar Senghor (1906-2001) a été président du Sénégal depuis l’indépendance du pays en 1960 jusqu’en 1980 où il a quitté volontairement le pouvoir. Poète, il a été le chantre de la négritude. Il estimait que le haïku était non seulement le poème le plus court au monde, mais aussi le plus beau. Il évoque la leçon poétique du Japon et les similarités entre les langues : La brièveté (…) oblige à "choisir les mots et expressions les plus denses, les plus expressifs, les plus beaux". Dans le domaine de la poésie, c'est le génie même de "nos langues agglutinantes, du Japon et de l'Afrique". L. S. Senghor, selon toute vraisemblance, n’a pas écrit de haïkus mais la pratique du haïku est très vivante au Sénégal et ce, depuis de nombreuses années.


Léopold Sédar Senghor disait :
 « J’ai rêvé d’un monde de soleil dans la fraternité de mes frères aux yeux bleus. »

Poème à mon frère blanc :

Cher frère blanc,
Quand je suis né, j'étais noir,
Quand j'ai grandi, j'étais noir,
Quand je suis au soleil, je suis noir,
Quand je suis malade, je suis noir,
Quand je mourrai, je serai noir.

Tandis que toi, homme blanc,
Quand tu es né, tu étais rose,
Quand tu as grandi, tu étais blanc,
Quand tu vas au soleil, tu es rouge,
Quand tu as froid, tu es bleu,
Quand tu as peur, tu es vert,
Quand tu es malade, tu es jaune,
Quand tu mourras, tu seras gris.

Alors, de nous deux,
Qui est l'homme de couleur ?

Léopold Sédar Senghor

À lire : Senghor, Léopold Sédar. Œuvre poétique. Paris, Éditions du Seuil, Collection «Points», 1990.

mercredi 12 octobre 2011

L'automne en haïkus

L’automne, ici, c’est le retour des grandes oies des neiges et des bernaches du Canada, qui font une pause de quelques semaines sur les battures du fleuve Saint-Laurent afin de refaire leurs forces avant leur longue migration vers le sud.

octobre sur les berges
le retour de la sauvagine
et des chasseurs

dans Laisse de mer, Éditions du Glaciel, 2009.

samedi 1 octobre 2011

Le haïku de guerre japonais

Durant la Seconde Guerre mondiale et après, des auteurs japonais ont écrit sur la guerre et sur Hiroshima. On peut en lire dans le recueil édité chez Gallimard, Haïku du XXe siècle – Le poème court japonais d’aujourd’hui, présenté et traduit par Corinne Atlan et Zéno Bianu, publié en 2007 :

Seul comme pour l’éternité –
la cicatrice
de ma blessure de guerre
Suzuki Murio


 
Emmailloté
dans ses bandages
le soldat devient géant
Watanabe Hakusen

Décombres de la guerre –
Sur un sol en ciment
Des fillettes jouent à la balle
Nakamura Kusatao

Le char de guerre avance –
il écorche la terre
à grand fracas
Mitsuhashi Toshio

La mitrailleuse –
éclosion d’une fleur rouge
au milieu du front
Saitô Sanki

Lors des combats dans le Pacifique, le cérémonial des kamikazes japonais prévoyait, paraît-il, un serment d’allégeance à l’empereur Hirohito et la récitation d’un haïku ou d’un tanka avant leur ultime sacrifice. Par exemple, ceci :

Puissions-nous mourir
Comme au printemps
Les fleurs de cerisier
Pures et brillantes.
Yamaguchi Teruo (22 ans)