mercredi 26 janvier 2011

Poésie brève

D’où vient l’intérêt pour les formes brèves, telles que le haïku? Dans le haïku, le message doit se suffire à lui-même. Il est à peu près délivré d’une interprétation subjective chez le lecteur et de la possibilité qu’il a habituellement de prendre du recul par rapport au texte. De ce fait, l’expérience épurée, relatée dans le haïku où chaque mot est utile, est à même de coïncider le plus possible dans l’esprit du lecteur avec l’instant vécu par le poète. C’est ce jeu, cette coïncidence qui suscite l’intérêt chez le lecteur et aussi chez le haïkiste. Le poète français Yves Bonnefoy, dans une conférence parle même d’une « capacité accrue de s’ouvrir à une expérience spécifiquement poétique. (…) Quand un poème adopte une forme brève, il se tourne déjà, de ce simple fait, vers ce qui peut être poésie dans notre rapport au monde. » [1]


[1] Yves Bonnefoy, « Le haïku, la forme brève et les poètes français », document en ligne.

vendredi 21 janvier 2011

La beauté

(© Roger Joannette)
L’esprit du haïku, c’est aussi être ouvert à la beauté, où qu’elle se trouve, entre autres dans la rigueur de l’hiver. Tiré de Adrénaline (Vents d’Ouest, 2009), mon haïku :
mes skis
s’accrochent à la poudreuse
froid extrême

jeudi 13 janvier 2011

D'âmes et d'ailes

Suggestion de lecture : le très beau recueil de tankas* de Janick Belleau, D’âmes et d’ailes, publié aux Éditions du tanka francophone. En sept chapitres, l’auteure aborde des thèmes chargés d’émotion : amour, famille, amitié, voyages, vieillissement, solitude, au-delà. En début de recueil, l’auteure nous présente un bref historique du tanka à travers la démarche d’écriture de plusieurs poétesses japonaises depuis le 9e siècle. Il est à noter que ce livre, tout en finesse et en sensibilité, a remporté le prix Canada-Japon 2010.
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*Tanka : comme le haïku, c’est un poème court d’origine japonaise de 31 syllabes, disposé en français sur cinq lignes. Le tanka aborde volontiers des sentiments, des thèmes profonds ou philosophiques.

jeudi 6 janvier 2011

Épiphanie et créativité

Aujourd’hui, 6 janvier, fête de l’Épiphanie. Pour l’écrivain irlandais James Joyce, une épiphanie est une manifestation spirituelle, un moment privilégié et fugitif de créativité que l’écrivain doit enregistrer et traduire dans l’écriture, sous la forme d’un petit poème en prose. En ce sens, l’épiphanie se rapproche du haïku. Philippe Forest[1] parle du haïku de Roland Barthes (auteur de L’empire des signes), en relation avec l’épiphanie au sens joycien du terme (p. 163) :
         « Barthes reconnaît dans l’épiphanie quelque chose d’analogue à ce qu’il nomme pour sa part « incident » - où quelque chose survient, apparaît – et dont il souligne l’affinité avec le haïku, par quoi se manifeste une certaine figure de la vérité, qui s’exprime dans la littérature japonaise selon la théorie zen du satori. (…) Le texte bref, explique Barthes, est expression du « C’est ça » - soudaine révélation du réel surgissant dans la nudité même d’une apparition irréductible à tout commentaire. En ce sens, épiphanie et haïku s’apparentent à la photographie, livrant également une expérience du « C’est ça ». (…)
Par le poème – haïku ou épiphanie – comme par la photographie, quelque chose fait image et (…) a valeur de marque laissée dans le temps par un évènement, évènement qui ne peut pas être exactement raconté mais comme désigné, pointé du doigt de manière à faire signe vers un certain moment de vérité…»
Joyeuses épiphanies !


[1] Philippe Forest, « Haïku et épiphanie : avec Barthes, du poème au roman », Ebisu,  numéro 35, printemps-été 2006, pp. 159-165