vendredi 19 avril 2013

Hashimoto Takako

Hashimoto Takako (1899-1963) a commencé à écrire avec Sugita Hisajo. Elle fait partie de la génération de femmes reconnues dans le monde du haïku. Elle s’est illustrée en particulier dans le groupe de la revue Hototogisu (Coucou) et dans celui de la revue Ashibi (Azalée) qui est toujours publiée aujourd’hui. Elle se joint à Yamaguchi Seishi en 1948 pour fonder la revue Tenro (Sirius).

Neige violente –
tant de choses à écrire
encore

Mille branches en fleurs –
mon vêtement de deuil
est une seconde peau

Tempête de neige.
Ma coiffure de veuve
en désordre.

Il commence à neiger.
Je me sens seule
en prenant mes baguettes

Coupant la pêche blanche,
la pointe du couteau
casse le noyau

Temps des moissons.
Sur mon sein, la morsure
de mon nourrisson.

Sous l’ardent soleil
la sève de pin embaume
à chaque coup de hache.

Quelques sources :
Corinne Atlan et Zéno Bianu, Haïku. Anthologie du poème court japonais. Paris, Gallimard, 2002.
Haïjins japonaises, Du rouge aux lèvres. Anthologie traduite du japonais et présentée par Dominique Chipot et Makoto Kemmoku. La Table Ronde, 2008. 265 p.
William J. Higginson with Penny Harter, The Haiku Handbook. Tokyo, Kodansha International, 1985. 331 p.

dimanche 14 avril 2013

Temps des sucres

la neige fond
au pied des érables
temps des sucres

Ce haïku est publié dans le numéro 39 de Gong, la revue francophone de haïku. Le temps des sucres désigne la période où on recueille, au printemps, la sève d’érable qu’on fait bouillir pour en faire du sirop.

Photo © Roger Joannette

lundi 1 avril 2013

Sugita Hisajo

Sugita Hisajo, née à Kagoshima en 1890 se fait connaître, comme beaucoup de femmes haïkistes, en participant à la revue Hototogisu (« Coucou ») fondée par Shiki et dirigée à ce moment par Kyoshi Takahama. Comme plusieurs autres, elle excelle à la fois en poésie et en calligraphie. Elle contribue à former Hashimoto Takako qui s’illustrera dans le haïku contemporain.

Une particularité de plusieurs de ses haïkus, outre la variété des thèmes, est la création d’une perspective en montrant à la fois un arrière-plan et un premier plan. Les fleurs sont souvent un prétexte pour utiliser ce procédé.

fleurs de volubilis
le ciel au-dessus de ce quartier
commence à s’ennuager


l’air frais d’automne
arrive aux fleurs d’hortensia
pays de Shinano

je coupe de la soie
des tiges de millets ondulent et s’entrelacent
à la fenêtre.

dans l’horrible foule
mon cœur s’est brisé
à la vue des lys innocents

temple en automne -
tirant violemment ses cheveux
une femme pleure

matin de froid-
tandis que j’allume le feu
l’enfant réveillé me rejoint

jour des chrysanthèmes-
en peignant mes cheveux mouillés
une pluie de gouttes

échos de voix d’un coucou
ils dominent la montagne
à volonté

enfoncé dans l’obi
trop serré et rigide
un éventail d’automne


kimono fleuri-
en se déshabillant s’accrochent
les différents cordons

Une lecture au second degré est souvent proposée pour ce dernier haïku. En effet, on veut y voir une volonté, pour Sugita Hisajo, de se dégager des  entraves qui maintiennent les femmes dans le rôle de mère au foyer. Elle affirme elle-même qu’elle n’éprouve aucun goût pour les tâches domestiques, se voyant totalement dédiée à son art, ce qui contraste fortement avec les mœurs de l’époque. Difficultés conjugales, idées suicidaires, maladie mentale, les différents auteurs ne s’entendent pas tous. Elle est morte, semble-t-il, dans un sanatorium en 1946.

Source : site Nekojita
Makoto Ueda, Far Beyond the Field. Haiku by Japanese Women – An Anthology. New York, Columbia University Press, 2003.
Haïjins japonaises, Du rouge aux lèvres. Anthologie traduite du japonais et présentée par Dominique Chipot et Makoto Kemmoku. La Table Ronde, 2008. 265 p.