samedi 6 octobre 2012

Lire le haïku

marées d’automne
rejetés sur la grève
les concombres de mer

tiré de Laisse de mer, Éditions du Glaciel, 2009.

Contrairement aux formes conventionnelles de poésie, le haïku ne doit pas chercher à faire joli, à produire un effet, mais à révéler le réel tel qu’il est. Le lecteur de haïku demeure dans l’ici et maintenant, il accueille ce qu’il lit sans jugement, tout en demeurant attentif à ses perceptions sensorielles pour recréer en lui-même ce que le haïkiste a vécu. Certains y voient là des rapprochements à faire avec la méditation zen, puisque, semblable à la méditation orientale, le lecteur doit laisser tomber ses jugements, ses a priori, ses idées préconçues.

Le haïku ne renferme aucun sens caché, aucune signification symbolique. Le lecteur doit arriver à recréer en lui l’atmosphère qui a présidé chez l’auteur à la création du haïku. La lecture à haute voix est parfois une aide précieuse.

Dans le cas du haïku qui nous occupe, celui-ci a été écrit lors d’une promenade, à marée basse, en bordure de l’estuaire du Saint-Laurent. Phénomène inhabituel, la grève était jonchée de concombres de mer. Le concombre de mer (Cucumaria frondosa) est un animal qui vit sur les fonds marins, parfois jusqu’à 350 mètres de profondeur, et qu’on ne voit pas à la surface de l’eau. Pour en trouver sur le rivage, on peut soupçonner qu’il y ait eu une force peu commune pour brasser les concombres de mer au point qu’ils soient éjectés de l’eau. Après lecture, la construction mentale qui se crée chez le lecteur sera probablement en lien avec le mauvais temps associé à l’automne, la force des marées qui rejettent, détruisent, et finalement laissent présager l’hiver et ses tempêtes.

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