Parce que cette forme si brève et si simple rejette le superflu en se
concentrant sur l’essentiel. On pourrait même dire, à la limite, qu’il chemine
vers le néant lorsqu’il devient minimaliste. Même si on tente, autant que possible,
d’éviter les rapprochements avec le zen, la démarche n’en demeure pas moins
spirituelle, dans le sens où le dépouillement et le détachement président à sa
création. Branché le plus souvent sur la nature, le haïku n’entretient pas
nécessairement de rapport descriptif avec la réalité, mais permet d’aller plus
loin, mettant parfois en évidence une symbolique, un élément esthétique, une
atmosphère particulière, qui ne sont pas exposés explicitement à la lecture du
haïku. Le haïku nous communique ainsi beaucoup plus de choses qu’il n’y paraît.
Réussi, c’est le poème auquel on ne peut ajouter ou retrancher un seul mot. On
va même jusqu’à dire qu’un bon haïku, lu à haute voix, ne devrait rencontrer
que le silence chez l’auditeur. C’est sans doute ce que Roland Barthes, dans L’empire des signes, appelle « la
vision sans commentaire ». Ce qui est aboli, ce n’est pas le sens, c’est
la finalité : le haïku ne sert à aucun des usages concédés à la
littérature, soit instruire, exprimer, distraire.
paru
dans la revue Gong, juillet-septembre 2017, p. 5.
Image : Hiroshige, 1832.
Source : The New York Public Library Digital Collection
TRES BIEN
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