samedi 28 novembre 2015

Neige de novembre



froid mordant
enveloppant le paysage
un brouillard glacé

dans Laisse de mer, Éditions du Glaciel, 2009, p. 31.

jeudi 5 novembre 2015

Une réflexion de Jack Kerouac sur le haïku


« Dans ce pays, on peut comprendre toute la parfaite beauté des haï-kaï que nous ont légués les poètes d’Extrême-Orient. Ces gens ne se laissaient pas enivrer par la nature; ils gardaient toute la fraîcheur d’esprit des enfants. Ils décrivaient ce qu’ils voyaient sans artifice ni procédés. (…) Un véritable haï-kaï doit être simple comme la soupe (en anglais, Kerouac dit : « as simple as porridge ») et cependant avoir la saveur de la réalité. Le plus beau des haï-kaï est probablement celui-ci :


Le moineau sautille sur la terrasse,
Il a les pattes mouillées.

C’est un poème de Shiki. On voit les traces des petites pattes mouillées avec les yeux de l’imagination. Et cependant, dans ces quelques mots, il y a aussi la pluie qui est tombée ce jour-là. On sent presque le parfum des aiguilles de pin humides. »


Référence : Jack Kerouac, Les clochards célestes (The Dharma Bums). Paris, Gallimard, 1963. Collection Folio 565, p.  94-95.

dimanche 18 octobre 2015

Automne





le foin de mer jaunit
les oiseaux sont immobiles
le fleuve attend l’hiver



dans Hivernité, Éditions du Glaciel, 2010, p. 3




dimanche 27 septembre 2015

Ce qu'ils ont dit : Dany Laferrière


Notre Immortel, Dany Laferrière, en entrevue du journal La Presse, confiait, il y a quelques années, les « 5 B » de sa vie de lecteur. En bref, des écrivains qu’il fréquente régulièrement : Bashô, Bukowski, Borges, Boulgakov, Baldwin. Sur Bashô, grand maître de haïku, il dit ceci :

«En route vers l'aéroport, j'ai toujours Bashô dans ma valise. Je connaissais Bashô pour l'avoir croisé parfois dans certaines revues underground. C'est un maître de cet art japonais du bref - le haïku. Trois vers, pas plus, et le tour est joué. Le haïku exige un sens de l'observation que notre époque a oublié. Qui, à part Bashô, entend la douleur de la cigale dans son cri?

Rien ne montre dans leur cri
Qu'elles vont mourir
les cigales


Il n'y a pas de morale chez Bashô. La cigale devient son cri, et ce cri traverse l'espace et le temps. Bashô un photographe de l'émotion. Son grand poème : «La Route étroite vers les districts du nord» reste à mon avis l'un des plus émouvants textes de la littérature universelle. Parce qu'il mêle la poésie à la prose, et les deux à la vie.»

Source (texte cité et image) : le blog d’Alain Mabanckou, Les 5« B » de ma vie de lecteur, par Dany Laferrière, 9 octobre 2007, citant un article de La Presse.  

mardi 4 août 2015

Prix Jocelyne-Villeneuve 2015





Les haïkus gagnants des Prix Jocelyne-Villeneuve de Haiku Canada sont connus. J’ai eu le plaisir de gagner le 3e prix.


1er prix – Ginette Poirier :
arbres dénudés
plus d’espace
pour le ciel

2e prix – Minh-Triêt Pham (France) :

sur la vitre du train
l’empreinte
de son regard

3e prix – Louise Vachon :

froid intense
à travers mes cils
des gouttes de lumière


Mentions honorables :

Pas vraiment inquiet
le bœuf en gagnant le prix
des bêtes à viande
(Gerard Mathern, France)

Depuis quinze ans
Il rouille sans hâte
Le barbecue dans l’herbe
(Marc Bonetto, France)

Lettre de la famille
petit bonheur du soldat
soudain un éclair
(Pascal Descorsiers, France)

soir d’automne
en vieillissant je préfère
le thé vert
(Gérard Dumon, France)

retardant
la tombée de la nuit…
flamants roses
(Cesar Ciobica, Roumanie)

cette femme
qui ne sait plus son nom
je l’appelle maman
(Gerard Dumon, France)


lundi 27 juillet 2015

Antonio Machado


Antonio Machado (1875-1939), poète espagnol, publie dès 1901 dans un journal littéraire et fait paraître son premier recueil, Soledades (Solitudes), en 1903. Il fait partie du mouvement artistique de la fin du XIXe siècle, la « Génération de 98 » qui essaie de revitaliser la production culturelle espagnole en la renouvelant. Il fait carrière aussi comme professeur de français à Soria puis à Ségovie. Dans la foulée de la guerre civile d’Espagne, engagé pour la cause de la république démocratique, il est contraint de fuir vers la France. Il mourra d’épuisement sur la route de l’exil, à Collioure, en 1939.



Les adeptes de longue randonnée connaissent déjà l’extrait d’un poème d’Antonio Machado qui dit :


Caminante no hay camino,
Se hace camino al andar.

Marcheur, il n’y a pas de chemin,
Le chemin se fait en marchant.

Antonio Machado pratique le haïku dans un style bien personnel qui lui apparaît propre à atteindre l’essentiel, l’absolu de la parole poétique :

Tus sendas de cabras
y tus madroñeras,
Córdoba serrana!

Tes chemins de chèvres
et tes madroñeras (peuplements d’arbustes de la famille des éricacées)
Montagnes de Cordoue!

La primavera ha venido.
¡Aleluyas blancas
de los zarzales floridos!

Le printemps est arrivé.
Blanches alléluias
Des ronces fleuries!


Junto al agua negra.
Olor de mar y jazmines.
Noche malagueña.

Près de l’eau noire.
Odeur de mer et de jasmin.
Nuit de Malaga.

La cigüeña absorta,
sobre su nido de ramas,
mirando la tarde roja.

La cigogne absorbée,
sur son nid de branches,
regardant le soir rouge.


En mi soledad
he visto cosas muy claras
que no son verdad.

Dans ma solitude
j’ai vu des choses très claires
qui ne sont pas vraies.

Source : Pour lire les haïkus deMachado (en espagnol).


dimanche 28 juin 2015

Promesse d'été





malgré le froid
la brume sur l’eau
promesse d’été



dans Laisse de mer, Éditions du Glaciel, 2009, p. 4

mardi 19 mai 2015

Sauvagine


les bernaches
remontent vers le nord
escale


dans Laisse de mer, 
Éditions du Glaciel, 2009, p. 5


Photo : © Louise Vachon

vendredi 17 avril 2015

Journée internationale du haïku


Le 17 avril a été proclamé « International Haiku Poetry Day » par The Haiku Foundation aux États-Unis. Des événements sont organisés, notamment le Hearth Rise Rolling Haiku Collaboration, qui invite les haïkistes à publier sur le site des haïkus sur le thème de la lumière.


au crépuscule
le temps s’arrête
dans un lit de lumière



© publié dans Laisse de mer, Éditions du Glaciel, 2009, p. 36

lundi 30 mars 2015

Lumière de mars




la clarté lumineuse
du soleil sur toutes choses
fin d’hiver



dans Hivernité, Éditions du Glaciel, 2010, p. 34



Photo : © Roger Joannette

lundi 16 mars 2015

Les 17 haïkus de Jorge Luis Borges


Écrivain argentin (Buenos Aires, 1899 – Genève, 1986), Jorge Luis Borges passe sa vie dans le monde des livres et de la littérature. Traducteur, critique, bibliothécaire, il fonde des revues littéraires et écrit bon nombre de poèmes, de nouvelles et d’essais, souvent érudits et fantastiques, reconnus par la suite comme des classiques du XXe siècle. Il devient directeur de la Bibliothèque nationale puis professeur à la Faculté des lettres de Buenos Aires. Il obtient plusieurs prix de littérature, dont le prix Cervantes en 1979. On lui reprochera son silence face aux crimes de la junte militaire en Argentine dans les années 70. Par ailleurs, certaines nouvelles de Fictions peuvent être vues comme une dénonciation du totalitarisme.

Claude Mauriac a dit de lui : « Jorge Luis Borges est l’un des dix, peut-être des cinq, auteurs modernes qu’il est essentiel d’avoir lus. Après l’avoir approché, nous ne sommes plus les mêmes. Notre vision des êtres et des choses a changé. Nous sommes plus intelligents. Sans doute même avons-nous plus de cœur. »

Ayant voyagé fréquemment au Japon, où il donne des conférences et dirigé des séminaires d’études, sans doute est-il influencé en retour par la poésie japonaise. Il écrit six tankas en 1972 et dix-sept haïkus en 1981, peut-être pour rappeler, par la symbolique des nombres, les dix-sept syllabes du haïku traditionnel. En voici quelques-uns :

Le soir et la montagne
m’ont fait une confidence.
Je ne la sais plus.

A-t-il existé
le rêve que j’ai perdu
à l’orée du jour?

Les cordes se taisent.
La musique savait
ce que je ressens.

Au loin, un trille.
Le rossignol ne sait pas
qu’il te console.

La vieille main
trace encore quelques vers
pour l’oubli.

Pour lire les 17 haïkus de Borges, de même que ses tankas (en espagnol).

Sources : Terebess Asia Online, Wikipédia, Fictions (Jorge Luis Borges, Folio, 1965).

vendredi 27 février 2015

Flocons





quelques flocons
les étoiles sur mon carnet
font de l’aquarelle

dans Hivernité, Éditions du Glaciel, 2010, p. 33


Photo : © Roger Joannette

lundi 9 février 2015

Froidure



froid de loup
l’auto ne démarre pas
congé forcé


dans Hivernité, Éditions du Glaciel, 2010, p. 31

Photo : © Roger Joannette

lundi 26 janvier 2015

Le vent de face



le vent de face
dans la tempête
la neige en rimmel


dans Hivernité, Éditions du Glaciel, 2010, p. 15

Photo : © Roger Joannette

lundi 19 janvier 2015

José Juan Tablada



José Juan Tablada (1871-1945) est un écrivain mexicain qui s’est illustré abondamment dans le haïku. Poète, critique d’art pour différents périodiques, il a également occupé plusieurs postes diplomatiques au Japon, en France, en Équateur, en Colombie, aux États-Unis. Un voyage au Japon en 1900 l’oriente vers le haïku. On dit de lui qu’il a fait connaître le haïku aux lecteurs hispanophones. Pour cette raison sans doute, il demeure estimé davantage dans le monde du haïku que dans celui de la poésie.

En français, l’Association francophone de haïku a fait paraître, en 2009, un recueil de Tablada, Papillons de l’instant (traduction : Patrick Blanche). En voici quelques extraits :

Les urubus
            Il a plu toute la nuit
            et ils n’en finissent plus
            de peigner leurs plumes au soleil,
            les urubus.

Le palmier
            Durant la chaleur de la sieste
            même ses éventails
            ne bougent plus leur palme…

Les fourmis
            Bref cortège nuptial,
            les fourmis traînent des pétales
            de fleurs d’oranger…

Les crapauds
            Morceaux de glaise,
            dans la pénombre du sentier
sautent les crapauds.

Papillon de nuit
            Rends au rameau dénudé,
            papillon de nuit
            les feuilles sèches de tes ailes.

L’araignée
            Parcourant sa toile
            cette clarté lunaire
            tient éveillée l’araignée.

Orange
            Donne à ma soif
            deux tasses dorées
            tout emplies de miel!

D’autres haïkus de J. J. Tablada (en espagnol).


lundi 12 janvier 2015

Mainichi Shinbun



clapotis de l’eau
des rorquals au large
mirage de vacances


Ce haïku vient de mériter une mention spéciale au 18e concours annuel de haïku du journal Mainichi (Tokyo). 

Photo :  © Roger Joannette